Tva dans la restauration. Noël en juillet

(Maj en fin d’article). Il fait chaud en France en ce moment. Le thermomètre monte et les prix devraient baisser en terrasses et aux tables des restaurants. C’est ce mercredi 1er juillet 2009 que rentre en application l’accord entre le gouvernement et les représentants des professions de la restauration. Ceux-ci ont obtenu le passage d’une TVA à 19,6% à 5,5% sur leurs produits.

Des épinards dans le beurre

La mesure coûtera trois milliards d’euros (on a aussi entendu parler d’un milliard d’euros au moment de la réflexion sur la baisse de TVA) à l’Etat moins 650 millions d’euros, selon le journal Le Monde, d’aides que l’Etat ne versera plus du fait de l’instauration de la baisse de la TVA. Pour un petit restaurant d’une vingtaine de couverts, le bonus peut représenter jusqu’à 40.000 euros par an.

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Parmi les moins élevés d’Europe

En contrepartie de cet avantage, les restaurateurs se sont engagés à baisser leurs prix de 11,8% sur un certain nombre de produits de leurs cartes parmi les plus consommés, créer des emplois, 20.000 selon leurs représentants + 20.000 recrutements d’apprentis, améliorer les conditions de travail et notamment salariales des employés et moderniser leurs installations. Ce dernier point devrait faire l’objet de financements d’Oséo, sous la houlette de l’Etat, sans que, dixit l’accord, les restaurateurs ne mettent plus de 30 millions d’euros de leur poche.

Cette TVA à 5,5% va permettre aux restaurateurs de bénéficier du taux de TVA le moins élevé de l’Union européenne, après le Luxembourg, célèbre pour la diversité de sa gastronomie et son talent bancaire qui relègue l’art culinaire et la cuisine moléculaire à la préhistoire.

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Une longue histoire

Cet avantage a été obtenu de haute lutte. Le premier à avoir repris les revendications des restaurateurs a été Jacques Chirac, alors président de la République, en 2002.

Nicolas Sarkozy a su mobiliser ses réseaux durant la présidence française de l’Union européenne pour convaincre les pays récalcitrants à cette exception à l’orthodoxie fiscale de l’UE, Allemagne en tête. Il faudra attendre le 10 mars 2009 pour qu’un accord soit trouvé lors d’une réunion d’Ecofin, le rassemblement des ministres des Finances de l’UE.

Cette demande des professionnels n’est pas une nouveauté. Elle est accompagnée d’un intense travail d’influence auprès des parlementaires et de l’opinion. En jouant la carte du pouvoir d’achat, les restaurateurs jouent sur du velours. Certains avec sincérité. On ne compte plus les initiatives de restaurateurs qui vendent à prix coûtant ou qui ont déjà appliqué la réduction de la TVA sur leurs menus pour faire revenir une clientèle plus encline à déjeuner sur le pouce ou dans la restauration rapide, à qui va s’appliquer également ce taux, et qui depuis plusieurs mois connaît une très nette progression de sa part de marché. En 2004, le gouvernement Raffarin inscrit dans la loi de Finances la baisse de la TVA sur la restauration. Pour l’UMIH, le gagnant c’est l’emploi. « les besoins sont énormes : on évalue à 40.000 emplois supplémentaires la première année. L’embauche connaît de telle difficulté que les professionnels disposeront d’une bouffée d’oxygène pour augmenter les salaires, attirer les jeunes dans nos métiers et les garder en les formant ». En cinq ans, 20.000 emplois se sont ainsi évaporés.

resaurationescargot

Le 28 novembre 2005, une opération escargot mobilisait 6.000 restaurateurs sur Paris. Et un sondage BVA montrait à bon escient que 87% des français « souhai[taient] que les engagements du gouvernement sur la baisse de la TVA soient respectés ». Dont acte. Les mêmes représentants, en particulier l’UMIH, s’étaient battus pour que les cercles militaires ne soient plus éxonérés de la TVA trois ans plus tôt afin d’éviter « les distorsions de concurrence ». Ils savent à l’occasion faire entendre leur voix en prenant contact avec leurs députés en régions et les tancer le cas échéant. http://www.ariegenews.com/news/news_9392_baisse-de-la-tva-dans-la-restauration-le-syndicat-hotelier-repond-au-depute-nayrou.html et l’UMP n’a pas manqué de le faire savoir.

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Un contrat moral pas légal

Les contrats d’avenir signés par les représentants (aucun syndicat salarié n’était convié) n’engagent pas les professionnels de la profession. Chacun fait comme il le souhaite sauf au moment de la déclaration de TVA. La ministre de l’économie indique que ce sont les consommateurs qui seront les juges et sanctionneront les restaurateurs qui ne joueront pas le jeu. Voire. Des contrôles de la répression des fraudes pourraient avoir lieu. Mais la seule base juridique valable serait que le restaurateur ait apposé son autocollant « Ici je répercute la TVA sur l’addition » et que dans les faits ce ne soit pas le cas. La tâche du comité de suivi, qui devrait se réunir tous les six mois, ne sera pas facile surtout qu’on ne tardera pas à oublier l’idée même de son existence.

La CGT Restauration n’a pas tardé à réagir. Sur un site internet dédié, elle appelle à la vigilance pour que les salariés, et les consommateurs, ne soient pas les seuls à ne pas profiter de la tournée du patron. D’autres secteurs d’activités appellent depuis longtemps à une réduction du taux de TVA sur leurs produits. C’est par exemple le cas des professionnels du disque avec moins de résultat jusqu’à présent. Il est vrai que les parlementaires font plus souvent campagne dans les bistrots-restaurants que dans les sièges des majors.

Cadeau bonus. On remarquera tout le talent de ce député Corse.

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Photo de couverture repris du site Infos Kébab.

Maj : Le 16 juillet 2009, on apprenait que la moitié des restaurants avait baissé leurs tarifs. Un tiers seulement respectant les termes de l’accord signé par les professionnels de la profession et Hervé Novelli.  Certainement, un manque de temps pour changer les étiquettes.

5 thoughts on “Tva dans la restauration. Noël en juillet

  1. 29 juillet 2009 at 16 h 24 min

    Je réagis à la MàJ du 16 juillet de l’article, ayant moi-même écrit sur ce thème :
    Où est la moitié des restaurateurs ayant baissé leurs tarifs ? Cette enquête n’est-elle que déclarative ? Paris est-il inclus dans le panel ?
    Selon une étude empirique personnelle, j’ai constaté une seule baisse de tarif pour une dizaine de restaurants fréquentés (la formule du midi ne voit pas évoluer son tarif, pas à la baisse en tout cas).

  2. admin
    29 juillet 2009 at 16 h 31 min

    Si vous les trouvez vous me le dites.
    A noter que, selon la DGCCRF, « localement, le contrat d’avenir a pu faire l’objet de dérogations (par exemple en Alsace : l’accord local consiste à baisser les prix de 5% sur la totalité de la carte) ».

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