Prévention routière. Les opérateurs d’avertisseurs de contrôles ont le gouvernement dans le radar

Coyote, Inforad, Avertinoo et Wikango viennent de créer un nouveau lobby : l’AFFTAC. Pour Association Française des Fournisseurs et des utilisateurs des Techonologies d’Aide à la Conduite. Ils appellent à une manifestation le 18 mai en France contre cette mesure.

Fournisseurs et utilisateurs, les majuscules ont ici leur importance car, de fait, il s’agit d’un lobby des industriels des solutions embarquées pour repérer les radars. C’est la clé du business de ces quatre opérateurs.

L’enjeu pour eux n’est pas mince. En effet, le gouvernement vient d’annoncer son souhait de limiter le recours pour les automobilistes à ces aides à la conduite. En clair, il ne sera plus possible d’utiliser ces technologies pour repérer les radars. Les cinq millions d’utilisateurs annoncés de ces produits en seront donc pour leur frais. On comprend mieux le désarroi de ces entreprises qui perdent alors toute raison d’être puisque leurs produits deviennent alors illégaux et le marché totalement annulé par cette réglementation à venir. Du point de vue technique, on peut se demander comme l’Etat pourra, dans des délais raisonnables, interdire l’utilisation de ce type d’outils. L’interrogation porte alors sur l’urgence d’évoquer ce point si aucune mesure concrète ne peut avoir lieu. Du point de vue de la sécurité routière, on peut se poser la question de savoir pourquoi ils ont été autorisés.

La vraie question est de savoir si ce type de solutions permet de réduire le risque d’accident sur la route. Jusqu’à preuve du contraire, aucune étude n’a pu en démontrer la réalité, ni le contraire d’ailleurs.

Pour se défendre, les quatre opérateurs publient sur le site une lettre type qu’ils invitent leurs utilisateurs à expédier à l’Etat. En voici le contenu :

« Monsieur le Premier ministre, Je souhaite vous faire part de mon mécontentement face à la décision injuste que vous avez annoncée le 11 mai dernier visant à interdire l’utilisation des avertisseurs de radars. Ils contribuent à assurer plus de sécurité sur les routes car ce sont de véritables assistants pour une conduite plus sûre. Ces appareils permettent de maîtriser sa vitesse grâce à l’affichage permanent de la limitation à respecter, d’être prévenu des zones à risques et des aléas de la route en temps réel. Ils améliorent la vigilance de chaque conducteur en aidant à lutter contre les risques de somnolence grâce au signal sonore qu’ils émettent régulièrement. Utiliser un avertisseur de radar ne fait pas de moi un délinquant de la route ! C’est pourquoi je vous demande dans l’intérêt de la sécurité de tous, d’annuler votre décision d’interdire les avertisseurs de radars ».

Et l’AFFTAC d’annoncer que 4,7 millions de personnes, « stigmatisées par le gouvenrement », leur apportent leur soutien. Quand on regarde les chiffres du nombre d’utilisateurs de ces quatre sociétés on est pourtant loin du compte : Coyote donne 1 million d’utilisateurs, Inforad, deux millions mais pour toute l’Europe, Avertinoo, 350.000 utilisateurs, et Wikango, 400.000. Ce qui fait 3,7 million d’utilisateurs annoncés, dont une partie de ne sont pas français. Et une part encore, peut-être non négligeable, peut disposer simultanément de plusieurs de ces applications. Et il est vraisemblable que nombre d’utilisateurs n’ont pas signé la lettre de soutien. Le chiffre annoncé de 4,7 millions semble alors plus tenir de la communication de masse que de la réalité commerciale.

Sur Turbo.fr, un article cite « 40 millions de conducteurs indignés ». Comme si tous les conducteurs pensaient la même chose de ces mesures. Le populisme n’est jamais très loin quand il s’agit d’automobile.

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Communication contre prévention


Mais dans cette affaire de prévention routière, on est hélas plus dans la communication que dans la réalité. Et ce de part et d’autre. L’Etat lui-même n’est pas exempt de reproches. Plusieurs mesures récentes vont ainsi dans le sens contraire de la prévention routière. Comme la possibilité de recouvrer ses points plus rapidement. Une mesure dont le message induit est une forme de déresponsabilisation des conducteurs. De plus, le public des jeunes reste celui qui est le plus exposé à la mort par accident de la route. Pour cette catégorie d’âge, il est la cause la plus meurtrière. Or du point de vue des solutions alternatives à la prise de son véhicule après avoir bu, ce qui relève de la responsabilité individuelle mais peut avoir des conséquences plus larges, autant dire que presque rien n’est mis en œuvre. Le tarif des taxis reste très élevé pour cette catégorie de population, et les solutions de transport en commun pauvres aux heures auxquelles les jeunes conducteurs prennent le volant.

De plus, face au lobbying des associations de personnes âgées, une mesure du plus grand bon sens, à savoir une visite médicale à intervalles réguliers pour mesurer la capacité à conduire, a été rejetée. Alors même que ceci relève du plus élémentaire bon sens. Pour pratiquer un sport, il est indispensable de disposer d’un certificat médical tous les ans. Pour la conduite, non ? Des millions de personnes conduisent en France sous l’emprise de médicaments psychotropes, dont certains peuvent avoir pour conséquence la somnolence et le ralentissement des réflexes. Résultat ? Aucune mesure de prise pour en mesurer les effets et interdire leurs consommateurs de prendre le volant. L’éthylotest anti-démarrage a certes été mis en place, avec un an de retard, sur les autocars transportant des enfants, avant son application pour tous les transports en commun en 2015. Mais pour les véhicules particuliers il est chaque fois remis aux calendes grecques. Or ce type de dispositif a un grand intérêt pour faire baisser les accidents de voiture liés à la conduite sous l’emprise de l’alcool. Pour le reste, les accidents de la route comprennent également les accidents dans lesquels des conducteurs ou passagers de deux roues et des piétons meurent.

Les différentes mesures prises dans le cadre de la lutte contre la délinquance routière, en plus des mesures réglementaires sur le parc automobile (contrôle technique par exemple), mais aussi l’amélioration des matériels… a conduit la France à voir le nombre de tués sur les routes divisé par trois en l’espace de trente ans. Au début des années 70 rappelons-nous qu’aucune limite maximale d’alcool n’était mise en place. Pas plus que les ceintures de sécurité qui scandalisaient déjà les défenseurs de liberté de mourir en conduisant.


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