Lobby vert. Plongée obscure dans l’écologie radicale

Succès aux élections européennes, adhésion de l’opinion publiques aux thématiques écologiques, mise au vert des entreprises, la planète bleue devient verte sous l’effet d’une prise de conscience global et de campagnes de mobilisation savamment orchestrées.

Si bien que le green-washing, technique qui utilise l’écologie comme déguisement pour une apparence socialement acceptable pour des activités pas si vertes que cela, est apparu, et qu’un nouveau terme va faire fureur, l’enverdeur. Qualificatif dont on affublera cet homme vert, petit ou géant c’est selon, jamais avare de conseils à ses contemporains sur la manière de se comporter pour préserver l’environnement.

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Les classiques de l’écologie

Les campagnes de communication les plus cools sont menées par le WWF qui sensibilise l’opinion publique sur les espèces menacées en brandissant son totem ancestral et chouchou des enfants : le panda, comme ici à Paris, avec des reproductions en papier mâché des 1.600 pandas encore vie en liberté à travers le monde, et essentiellement en Chine.

Photo : Laurent Baheux

Photo : Laurent Baheux

Les plus provocateurs dans la communication institutionnelle sont les membres de Greenpeace qui utilisent la promotion visuelle pour compenser leurs moyens financiers limités. A l’occasion de la campagne de sensibilisation sur le thon rouge en Médittérranée, espèce menacée par la surpêche, Greenpeace n’avait pas hésité à envoyer aux abords du port de Marseille, refuge des thoniers, quitte à provoquer l’ire des pêcheurs. Il s’en était fallu de peu que l’affrontement dégénère.
Greenpeace n’hésite pas, de manière pacifique, à monter son désaccord à l’occasion de manifestations atypiques comme ci-dessus sur une centrale nucléaire.

A l’abordage

A côté de ces écolos bon teints, des branches plus musclées existent qui délaissent l’influence pour la violence, dans les actes ou les propos. C’est le cas de la Sea Sheperd Conservation society. Avec ses navires, le capitaine des écolos-pirates, Paul Watson n’hésite pas à citer Theodore Roosevelt pour venir à sa rescousse et stigmatise les donneurs de leçons, « Il est incroyable de voir combien il existe d’experts auto-proclamés et de combien de temps ils disposent pour établir des jugements arrogants sur mon équipage et moi ».

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A côté des écolos-warriors, un courant de pensée tente depuis plusieurs dizaines d’années d’émerger, celui de la deep ecology (écologie profonde). Celui-ci pense que le problème de la planète c’est l’homme et la croissance exponentielle de sa population. Jugez plutôt, nous sommes actuellement 6,7 milliards d’êtres humains sur la planète, 9 milliards à l’horizon 2050 selon les démographes. Trop, jugent les tenants de la deep ecology qui estime que seule la décroissance de la population peut à terme résoudre le problème environnemental auquel la terre est confrontée.

A cette date, la plupart des pays devraient entrer dans une phase de transition démographique, c’est-à-dire que la population qui naît n’excède pas de beaucoup la population qui décède, si bien que se met en place une forme d’équilibre démographique. Cela ne tient évidemment pas compte des changements socio-culturels, économiques et sanitaires qui pourraient avoir lieu entre aujourd’hui et cet horizon temporel.

Biocentrisme

Cette position va évidemment à l’encontre de pensée dominante qui veut que plus un pays dispose d’une population nombreuse plus il est puissant. La France de Napoléon a misé sur sa supériorité démographique pour tenter de conquérir l’Europe, et les cocoricos qui abondent à la publication des statistiques de la fécondité en France plaident en ce sens. Une population qui croît c’est de la puissance et des consommateurs en plus, pour les uns, des problèmes supplémentaires pour les autres.

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Dans l’un de ses derniers livres, le Parfum d’Adam, Jean-Christophe Rufin explique cela très bien. Dans les notes qui suivent l’histoire, Rufin explique l’histoire de ces écologistes extrêmes. Et cite William Aiken, l’un des penseurs principaux de ce courant de pensée qui sert de fil conducteur au livre :

« Une mortalité humaine massive serait une bonne chose. Il est de notre devoir de la provoquer. C’est le devoir de notre espèce, vis-à-vis de notre milieu, d’éliminer 90% de nos effectifs ».

Une citation tirée du livre édité par Tom Regan « Earthbound : Essays in Environmental Ethics » dans lequel il cite Aiken. Le livre de Rufin n’a pas fait plaisir à tout le monde puisqu’il présente ce courant de pensée de manière assez péjorative, parce qu’il en fait des assassins. Comme d’autres ont suggéré le rôle du DDT, un pesticide, dans le contrôle démographique de la population srilankaise. Ce courant de pensée met en avant le biocentrisme, centré sur le vivant, et non plus l’anthropocentrisme, centré sur l’homme, ce dernier étant une composante comme les autres du monde vivant. Laurent Larcher décrit aussi cela dans son livre, la face cachée de l’écologie. On peut trouver dans le mouvement Earth First, un parangon de cette théorie. Deux ministres du gouvernement, Laurent Wauquiez et Chantal Jouanneau évoquaient cette « écologie profonde » dans une tribune du journal Le Monde le 6 juin 2009 : « comme le préconise le philosophe de l’écologie, le Norvégien Arne Naess, tourner le dos à l’écologie « superficielle », qui préserve les ressources dans le seul objectif de générer du profit, et oeuvrer en faveur d’une « écologie profonde », qui transforme le rapport de l’homme à la nature ». On imagine mal nos deux ministres préconiser la réduction de la population au niveau mondial, mais tout de même, l’expression est là et termine même l’article.

Ils ne sont pas les seuls à suggérer cette décroissance démographique. Le lobby dénataliste compte dans ses rangs un certain nombre de dirigeants d’entreprises, qui proposent néanmoins des moyens moins radicaux en préconisant l’élévation du niveau d’instruction afin de permettre aux pays du sud d’élever leur niveau de vie, et de fait une diminution de leur fécondité.

Ce qui n’aurait pu apparaître que comme un mouvement utopiste s’est transposé dans la réalité. De nombreuses personnes considèrent qu’avoir des enfants n’est pas une bonne chose pour la planète et préfèrent s’en dispenser, là où la pression sociale invite plutôt à se reproduire.

Cette idéologique écologiste radicale prendra-t-elle de l’ampleur ? Difficile à dire. Il reste qu’elle peut prospérer sur un terrain de plus en plus fécond à entendre ses arguments et qu’elle pose des questions sur la définition de développement durable qui méritent d’être mises sur la table.

Mikaël Cabon

Cadeau bonus. Si vous avez du mal à dormir le soir, vous pouvez regarder cette vidéo en anglais.

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5 thoughts on “Lobby vert. Plongée obscure dans l’écologie radicale

  1. Alarc'h
    9 décembre 2009 at 19 h 59 min

    Je découvre votre article après la lecture du livre de Ruffin, qui bien prudemment se défend à la fin de toute appartenance à cette écologie radicale qu’il feint de trouver « abominable ». Pourtant par quelle prouesse d’hypocrisie peut-on nier que la surpopulation humaine est le problème majeur de notre planète ?

    Les espèces doivent être régulées, si elles ne savent pas le faire elle-même on peut supposer que des mécanimes naturels s’en chargeront. Pour l’espèce humaine on connaît ces mécanismes non ? Épidémies, guerre, ou mort par manque de ressources. Pourquoi y échapperions nous dans les décennies à venir? Il faut peu ou prou « dégager » quatre milliards d’humains… pas agréable à faire sans doute, mais je pense que cela se fera par les tout bêtes moyens cités plus haut.

    Que notre sensiblerie pseudo-humaniste nous rende cette perspective difficile à admettre n’a aucune importance, car la croissance démographique ne peut tout simplement pas continuer. Mais ce n’est pas une raison pour en perdre le sommeil.

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