Imposition des sportifs pros. Le lobby du sport montre ses muscles

Rappelez-vous, c’était le temps des fleurs, on ignorait la peur, et nos sportifs faisaient rien que payer des impôts si bien qu’ils émigraient en charters de première classe vers d’autres championnats plus rémunérateurs : l’Espagne, l’Italie, l’Angleterre. D’où l’idée de Jean-François Lamour, alors ministre des sports, et ancien escrimeur de haut niveau lui-même, de voter une loi qui permettrait sous couvert de droit à l’image d’exonérer de cotisations sociales 30% de la rémunération d’un joueur. Cette loi datait de 2004. Dans une notice de l’Urssaf, qui précise les modalités d’application au sein de l’organisme en matière de charges sociales, on peut lire que le dispositif n’est applicable , qu’aux sportifs professionnels évoluant dans des sports collectifs tels que le football, le rugby, le basket-ball, le volley-ball, le hand-ball ». Normal puisqu’il s’agit d’une rémunération basée sur la valeur d’image de l’équipe dans laquelle le sportif joue.

Match nul, balle au centre

La loi concernait 1.200  à 1.400 sportifs professionnels pour un avantage estimé au total à 30 millions d’euros. La loi a donc été modifiée et ce fameux DIC devait disparaître au 31 décembre prochain. Devrait car les choses ne sont pas si simples. Depuis cette remise en cause, plusieurs intervenants sont montés sur le ring afin de fustiger cette mesure (et viennent de réussir en partie car une dépêche AFP signale au moment où j’écris cet article que la mesure est reportée de six mois, ce qui représente un nouveau camouflet pour le parlement). Et non, on m’appelle en direct pour dire qu’une dépêche AFP vient d’entrer sur le terrain pour signaler que la mesure est reportée de six mois. Car un sportif cela se bat jusqu’au bout, tant que le match n’est pas terminé.

C’est la faute de l’arbitre

–          Rama Yade, ministre des sports, passée des droits de l’homme aux droits à l’image, déclarait : «  le DIC a démontré son efficacité puisqu’il a permis de retenir ou de faire revenir certains joueurs professionnels en France, comme cela a été récemment le cas avec Sébastien Chabal ou Yoann Gourcuff » »

–          Ces mêmes joueurs sont repris dans le communiqué de presse de la LFP, ligue de football professionnelle, qui sort le même jour : « à attirer des grands joueurs étrangers que ce soit Sebastien Chabal, Gaby Heinze, Jonny Wilkinson, Yoann Gourcuff ou encore Nikola Karabatic prouve toute l’utilité du DIC ». Entre la LFP et Rama Yade, cela s’appelle du travail d’équipe.

–          Noël Le Graët, vice-président de la Fédération Française de Football (FFF) et président de l’EA Guingamp, « Jusqu’à présent, 30% des salaires n’étaient pas soumis aux charges sociales au titre de la publicité et du droit à l’image. «Les députés ont fait un mauvais calcul car si j’ai 400.000EUR en moins, je ne les dépenserai pas. Donc, il n’y aura donc pas un rond de plus pour la Sécu»

Le président de la république semble revenir sur cette décision en demandant la création d’une mission de réflexion sur la question. Ce qui est souvent le meilleur moyen d’enterrer l’objet de leur sollicitude.

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Et un, et deux, et trois zéro

Le sport est un sujet éminemment politique, par ses conséquences, les rapports aux pouvoirs qu’il engendre. La question des droits à l’image se trouvait déjà dans le rapport d’Eric Besson, actuel ministre de l’identité nationale et des expulsions, passionné de football, intitulé « la compétitivité du football français ». Ce document très bien écrit présente l’état des lieux en particulier économique du monde du football et lance quelques pistes. Comme notamment celle du « salary cap », c’est-à-dire le plafonnement de la masse salariale des clubs dans le cadre d’une législation européenne. Le rapport indique également que la bonne santé des clubs français en terme financiers ne va de pair avec leur compétitivité sur la scène européenne. Le ministre propose de créer des « fondations d’entreprise du club professionnel » ». L’avantage est très sportif puisque « L’avantage fiscal pour le club est indéniable puisque 60% des versements faits au bénéfice d’une fondation d’entreprise sont déductibles de l’impôt dans la limite globale de 5‰ du chiffre d’affaires hors taxe. ».

En annexe 2 de son document, qui précède l’annexe 3 consacrée au DIC, Eric Besson revient sur la prime d’impatriation qui permet à un joueur en provenance de l’étranger de ne pas payer d’impôts sur le revenu. De même que « Les revenus perçus pour une activité effectuée à l’étranger pour le compte de l’employeur peuvent être exonérés totalement (type primes de la ligue des champions) ». Voilà une question dont on aura moins parlé à l’Assemblée nationale ces dernières semaines.

Le ballon du match vous est offert par BetClic

Au-delà de la question de l’imposition des joueurs, les clubs sportifs font feu de tout bois afin de multiplier leurs recettes et restreindre leurs dépenses, en somme faire du profit, ce qui n’est pas mal en soi, rappelons-le pour tous les krypto-communistes qui lisent ce texte et qui pensent encore que Puksas est le meilleur attaquant du monde.

Leur lobbying a notamment porté sur l’ouverture en France des paris en ligne. L’AS Monaco, un club qui par définition n’est pas français mais c’est tout comme, avait lancé l’offensive en nouant un partenariat avec la société BWin.

L’Olympique lyonnais n’est pas en reste, puisqu’il loue son maillot à BetClic pour 10 millions d’euros à l’année. Jean-Michel Aulas, président du groupe OL, coté en Bourse, ne perd jamais une occasion de parler de son sponsor principal qui, vous le devinerez au visionnage de la vidéo ci-dessous s’appelle : BetClic, cité une fois toutes les 20 secondes. Très fort.

Foot – L1 : Aulas défend son sponsor – kewego
Jean-Michel Aulas a estimé que le refus de la Ligue d’accorder à son club le droit d’arborer sur ses maillots son sponsor Betclic, société de paris en ligne, va coûter très cher.

Alors on parle beaucoup de football, mais le rugby est lui aussi touché par la mesure. « L’impact de cette mesure sera très conséquente sur l’économie générale des clubs, a poursuivi Pierre-Yves Revol, le président de la LNR. Pour le seul Top 14, ce sera plus de dix millions d’euros de charges supplémentaires par an à assumer, pour des clubs dont certains sont déjà en situation de fragilité. L’économie du rugby sera grandement fragilisée. »

Enfin, ces actions d’influence portent également sur la possibilité pour les sociétés sportives de posséder leur propre stade tout en les finançant partiellement avec de l’argent public, au moins dans les infrastructures (routes, parkings, transports en commun…) qui les entourent.

Si on peut comprendre que la décision du parlement de revenir sur cet avantage en cours de saison, ce qui perturbe la réalisation des budgets, il n’en reste pas moins que les sportifs restent des contribuables comme les autres. Disposant de revenus en moyenne beaucoup plus élevés (45.000 euros en moyenne pour un joueur de football de ligue 1) que la population, il est logique qu’ils paient à la mesure de ces revenus sans chercher à échapper outre-mesure à des impôts qui sont un devoir de solidarité nationale que ces mêmes sportifs sont bien contents de mettre à contribution quand il s’agit de faire financer par la sécurité sociale leurs arrêts maladies ou bien les soins consécutifs à leurs blessures. Ce qui n’avait pas été du goût de la Caisse Primaire d’Assurance Maladie de Nantes suite à la blessure d’un joueur nantais par un joueur marseillais lors d’un match en 1999. Elle avait demandé et obtenu la condamnation de l’OM à payer 29.123 euros pour payer les frais.

En bonus. Les salaires des joueurs du PSG

Dans l’Express

Dans l’Equipe

Et Roberto Cabanas et Bernard Ferrer (Stade Brestois) dans une vidéo d’un autre temps.

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Dessin Jiho

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