Les titres restaurants font saliver beaucoup de monde

Les tickets restaurants constituent un avantage substantiel pour les salariés. Abondés par leurs employeurs, ils permettent de disposer d’une réserve de pouvoir d’achat non-imposable. Selon les entreprises, l’avantage est conséquent. Jusqu’à 5,21 euros par jour de travail et par salarié exonérés de charges sociales et fiscales. Soit sur l’année de 600 à 1.200 euros. Près d’un demi-mois de salaire. En 2007, 616 millions de titres ont été distribués à entre 3 et 8 millions de personnes, selon les sources, pour près de 42 milliards d’euros de chiffre d’affaires. Quatre entreprises se partagent la tambouille : Ticket Restaurant (Accor Services), Chèque déjeuner (Groupe éponyme), Chèque de table (Natixi Intertitres) et Chèque restaurant (Sodexo). Trois de ces entreprises avaient été mises en cause au début des années 2000 pour entente.

Viva la concurrencia

La commission de la concurrence leur reprochait de s’être mise d’accord pour « consolider leurs parts de marché », c’est-à-dire ne pas être trop agressive commercialement les unes contres les autres.  Leurs parts de marché respectives étaient alors les suivantes : Accor : 38.3% – Chèque-Déjeuner : 36% – Sodexo : 19.4% du marché français en 1997. En 2006, neuf ans plus tard, leurs parts de marché étaient respectivement les suivantes : Accor Service 37%, Chèque Déjeuner 34%, Sodexo 20%. Comme on le voit sur le tableau, les choses ont beaucoup changé depuis.

Le site de la commission des titres restaurants est d’ailleurs très évasif sur la manière de procéder et les informations pour monter une entreprise d’émissions de titres restaurants.

La fiscalité et les conditions d’utilisation des tickets restaurants font l’objet de beaucoup d’attention. Ils constituent une niche fiscale, 2,4 milliards d’euros de perte d’assiette fiscale, que je multiplie par 40% ce qui donne 960 millions d’euros de pertes de recettes fiscales directes, justifiée si ce n’est moralement eu égard à tous ceux qui n’y ont pas le droit au moins par la tradition puisqu’ils existent depuis cinquante ans et que la Commission nationale des titres restaurants cherchent à justifier dans des calculs complexes et contradictoires. Bien que Jacques Stern, président d’Accor, qui édite les Tickets Restaurant, dise le contraire : ils sont « surtout un avantage social et pas une niche fiscale ». Cela fait de suite plus chic et moins suspect et ce ne sont pas les heureux bénéficiaires qui lui donneront tort.

Christine Lagarde, la ministre de l’économie, vient d’indiquer que le champ de leur utilisation va être étendu aux produits laitiers. La ministre signera un décret dans la semaine, avec une rapidité que bien d’autres décrets lui envient, en ce sens. C’est qu’elle promettait déjà il y a trois mois. La ministre avait même lancée une étude pour la taxation des titres restaurants et autres chèques vacances. Dans son interview sur RTL, la ministre annonçait que les nouvelles mesures prises par son ministère permettraient de passer de 4.000 à 10.000 points de vente acceptant les titres. Difficile d’en savoir plus sur ces chiffres puisque Chèque déjeuner comptabiliser plus de 170.000 points de ventes rien que pour ces titres ! La raison tient peut-être au fait que les ministres n’ont pas accès à l’avantage des titres restaurants.

Les restaurateurs en arrière-cuisine

Pierre Méhaignerie, député d’llle-et-Vilaine n’était pas le dernier à demander cette extension aux produits laitiers, « nos amis pour la vie », comme en témoigne cet article d’Ouest-France de février 2010. Elu d’un département où l’élevage laitier est omniprésent, on y trouve également l’exploitation de Jean-Michel Lemétayer, président de la FNSEA, le principal syndicat d’agriculteurs.

En mars déjà, une première extension de l’usage des tickets restaurants avait été permise, sur l’achat de fruits et légumes. A la grande colère des restaurateurs, comme l’indiquait cet extrait d’un article qu’Europe 1 consacrait à la question. « Mais pour les syndicats de restaurateurs, cette première extension décidée en mars détourne le titre-restaurant de son usage d’origine : permettre d’acheter des plats chauds à près de 3,5 millions de salariés ne disposant pas de cantine d’entreprise ». Les mêmes qui avaient mobilisé les réseaux pour diminuer les possibilités d’utiliser ses titres restaurants pour les courses alimentaires. Notamment parce que d’autres produits étaient achetés avec ces titres. Ce qui est vrai. Cela n’en dédouane pas forcément le monde de la restauration de pratiques elles aussi illégales, comme le montre cette vidéo du site Eco89.

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Des restaurateurs qui font du lobbying afin de conserver un avantage acquis. Voilà qui n’est pas sans rappeler l’histoire de la TVA à 5,5 % dans la restauration. Histoire sur laquelle je prépare un prochain article avec un premier bilan un an après son instauration, si vous avez lu restauration il était temps d’aller déjeuner, avec ou sans chèque repas, le 1er juillet 2009.

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