Un quart de la population française dispose d’un profil Facebook, 400 millions de personnes à travers le monde, en créant Facebook avec Eduardo Saverin, Mark Zuckerberg a réussi un coup de génie marketing. Mais voilà toute médaille a son revers. Après avoir encensé Facebook, « et maintenant on va passer à la question Facebook de nos auditeurs », les médias font la chasse à l’envers, les apéros géants sont devenus des apéros Facebook depuis qu’un jeune homme est mort à Nantes, pour découvrir que tout lieu d’expression porte en lui les possibilités d’une transgression.
Au début Facebook, c’était « super cool ».
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Ensuite, un peu moins.
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La question du traitement médiatique de Facebook du point de vue des dangers et des avantages n’est pas la plus importante. Pour Facebook, la menace porte sur la question de sa gestion des données privées. A l’instar de Google, qui connaît et stocke l’ensemble des recherches réalisées par les internautes pour cibler ses publicités, l’entreprise américaine fait aujourd’hui l’objet de plusieurs récriminations de la part des autorités. Aussi bien aux Etats-Unis qu’en Europe.
Données privées – données publiques
Les conditions d’utilisations du site américain sont plus longues que la constitution américaine dit ce site, de 1.300 mots environ. Suggérant ainsi que cela nous cacherait des choses. La constitution française qui compte plus de 12.000 mots, deux fois que la « constitution de Facebook » et la constitution américaine. Il n’y a pas de rapport entre le nombre de mots dans un « contrat » et son danger potentiel.
Néanmoins la question des données privées est considérable ici. Il ne s’agit pas des données type photo de fêtes, ou concours de vomis dans les toilettes de la fac comme on peut le voir parfois, mais celles qui permettent la segmentation des utilisateurs afin de leur proposer des publicités circonstanciées et des offres adéquates. Vous êtes célibataire ? Des publicités proposant des rencontres dans votre région avec Héléna qui veut tant venir habiter dans les Ardennes et qui « aime beaucoup française littérature ». Vous avez plus de 50 ans ? Ce n’est pas grave, prenez « Booster Matin, pour vous booster le matin ». Et le reste à l’avenant. Cela s’appelle de la publicité. Et si vous regardez bien vos écrans pubs sur votre grand écran, vous constaterez que là aussi le type de publicités change en fonction du public ou de l’heure de la journée. Le soir pendant le film, il y a plus grande dominante de produits sucrés, glaces, barres chocolatées…, que l’on voit beaucoup moins le matin.
Mais derrière l’accès à ces données privées, plusieurs risques sont possibles :
– Celui de l’accès à ces données, parfois très personnelles, par des personnes mal intentionnées ou non autorisées en raison de failles de sécurité.
– Une sorte d’obligation à la transparence pour les utilisateurs pour ce qui est d’abord de leur sphère privée à l’ouvrir sur la sphère publique. Ainsi des collectivités américains demandent à leurs futurs employés leurs codes d’accès Facebook pour regarder le compte et l’activité du futur recruté.
– La crainte de Big Brother. Elle est très sensible en Europe pour des raisons historiques et culturelles. Alors que les caméras qui se multiplient dans les rues ne souffrent que de peu de contradictions, la question des fichiers informatiques elles soulèvent toujours beaucoup de polémiques. Celle-ci est exacerbée suite au changement des conditions d’utilisation de Facebook.
Toutes ces questions ont amené les autorités à examiner de plus près le cas de Facebook, et plus largement des réseaux sociaux de ce genre.
Ainsi, les USA demandent à Facebook de s’expliquer sur ces questions, l’Europe aussi notamment avec le G29, lire ici son avis de juin 2009.
Facebook contre-attaque
C’est gênant pour Facebook à la fois pour son image, plutôt sympathique ce qui attire de nouveaux utilisateurs, et pour ses finances. Pour se défendre, Facebook contre-attaque. L’entreprise vient ainsi de recruter Tim Muris. Tim n’a pas encore de profil Facebook, son engagement n’est pas officiel, mais cela ne devrait tarder. Son rôle va être de retarder les procédures, « stratégie du chameau qui n’a pas soif », puis ensuite de négocier pied à pied avec l’administration sur tous les points. On peut compter sur Tim. Il a été pendant plusieurs années président de l’US Federal Trade Commission, où il défendait ardemment les droits des consommateurs. C’est un peu la même stratégie que Microsoft, qui est un gros contributeur financier de Facebook : gagner du temps. Depuis près de 15 ans que Microsoft est en procès avec l’Europe au sujet des achats liés entre ordinateur et système d’exploitation ainsi que les logiciels, le géant de Seattle n’a pas payé un centime d’amende, malgré plusieurs condamnations.
Dans le même temps, Facebook a engagé un autre Tim, Timothy D. Sparapani. Avocat spécialiste des libertés publiques, il est directeur de la « public policy ». Cela c’est l’illustration de la stratégie « Bad cop, Good cop ». L’avenir dira qui des deux Tim était le méchant.
Cette histoire illustre à merveille notre temps. Elle montre une nouvelle fois que personne ne lit les conditions d’utilisation des services auxquels il souscrit, trop long, trop compliqué, trop pas le temps. Comme le rappelait Olivier Bomsel, dans une récente interview, l’écrit reste la marque des contrats, des engagements et de la confiance. Donner son accord, c’est accepter ce qui est écrit. Dans l’attente d’une modification des conditions d’utilisation, que peuvent faire les internautes ?
– Fermer leur profil Facebook. C’est l’arme nucléaire, peu y souscrivent, d’autant qu’une partie des données, et c’est là également un problème, reste accessible. Pour savoir comment faire, lire ici.
– S’inscrire sur d’autres réseaux sociaux, comme MySpace qui vient de prendre le contre-pied de Facebook. Sa nouvelle charte est présentées comme plus simple.
– S’éduquer, s’instruire à la communication numérique. En informatique, tout est traçable, cela ne signifie pas que tout est tracé et que quelqu’un derrière son ordinateur surveille vos faits et gestes, on n’est pas en Chine. Mais cela signifie que ce que l’on croit être du privé ne l’est pas forcément. Pour plusieurs raisons. D’une part dans toutes les listes d’amis, il y a bien certaines personnes qui se trouvent là un peu par hasard, jamais rencontrées, amis d’amis… Comme on apprend à se tenir en public, il faut apprendre à se tenir sur Internet, à en connaître les répercussions possibles. Et à y tenir des propos que l’on pourrait avoir dans le monde réel.
– Protester contre Facebook, et les autres. C’est le cas de nombreux groupes Facebook comme celui-ci. Les pauvres, je pense qu’ils vont être déportés sur un serveur de Sibérie vite fait, bien fait. Cela leur apprendra. Cela s’appelle la pression du consommateur.
– Quitter la terre pour un monde virtuel. C’est ce que proposent les scénaristes de ce film, 8th Wonderland.
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En savoir plus.
– Un dossier d’Arrêts sur Images. (Si vous n’êtes pas abonné, je peux vous offrir un accès d’essai) pendant un mois
– Sur l’actualité de Facebook, un site très bien informé, Inside Facebook.
– Et plus largement, indispensable Demain la veille
Cadeau bonus. Un sketch sur Facebook.
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3 thoughts on “Attaqué à propos de sa gestion des données privées, Facebook prépare sa défense”